UNE RETRAITE DE 4 JOURS au MONT SAINT MICHEL
En ce mardi 28 janvier 2020, en tout début d’après-midi, sous le soleil et un vent glacial, le Mont St Michel nous reçoit. Fébriles, nourris de gratitude, nous lui faisons allégeance pour les 4 jours à venir. La joie est grande.
Nous suivons le plan indiqué par Sœur Claire.
Nos échanges par mails et téléphone (inscriptions, demandes d’informations) précis et cordiaux transpirent cette joie communicative, que nous serons amenés à partager par la suite.
Elle nous a signalé les travaux qui barrent la rue principale. Il nous faut passer par les remparts. Chargés de nos valises et sac à dos, nous grimpons les escaliers particulièrement raides, aux marches de pierres usées par le temps…se laisser glisser le long des murailles….une vue à « perte de vue », entre le Ciel bleu, la Terre verdoyante et l’Eau tout autour qui miroite le Soleil : la douce sensation d’être au Cœur d’un Tout, infiniment généreux.
C’est déjà une réalité qui nous fait rêver !
Ouf, notre lieu d’hébergement, l’hôtel d’Abraham. Une aubaine : nous avons le code ! Nous pénétrons les lieux dans un silence « total » : pas âme qui vive. Les noms sont portés sur une feuille, avec le numéro des chambres.
Nous montons nos affaires au 3ème étage, dans un petit nid douillet, en sous-pente dont les poutres sont en bois : un lavabo, 2 petits lits, 2 Livres de vie de Jérusalem sur chaque chevet, la bible grandement ouverte devant la petite fenêtre donnant sur la campagne environnante : une touche spirituelle, délicate et sensible, une invite au recueillement.
Un petit mot glissé sur la table de la cuisine, pour signifier notre possession des lieux, et dehors, une sensation de bien-être : Le Mont est à « nous », il nous habite déjà.
Après nous être restaurés dans la rue principale, le tour des remparts s’impose, avec les escaliers qui vont avec, en prévoyant l’accueil à 15h15. Là, nous croisons Frère Philippe, hospitalier venant à notre rencontre.
Il va nous servir de guide. D’entrée, il nous remet le précieux sésame : la clé passepartout qui par des raccourcis ouvre les portes nous permettant d’accéder aux cuisines, au monastère et dans l’abbaye. Nous avons même un badge de « retraitants », qui nous évite l’entrée public : du luxe, un privilège dans ce lieu plein de mystères.
A cause des travaux, le distributeur automatique de billets de la Poste est hors service. Face à notre mine déconfite, le serveur du café restaurant s’avance ; il peut nous dépanner, si besoin. Il explique : « En prenant un café à 3 euros, j’encaisse 43 sur votre CB et je rends 40 euros en cash ». Simple, et vraiment sympa. Heureux comme des gamins, notre retraite commence au-delà de nos espérances. Tout est là pour nous accueillir, poser nos valises, nous laisser guider.
En cette douce journée hivernale, le bonheur est dans les prés … salés du Mont St Michel.
A 18h, guidés par nos voisines retraitantes, Marie-Laure de Bayonne et Véronique de St Malo, toutes deux inconditionnelles du Mont, nous montons aux Vêpres, à la chapelle.
En fait, elles soutiennent l’association qui aide à maintenir bénévolement la présence religieuse sur le site.
Deux communautés de moines et de moniales des Fraternités Monastiques de Jérusalem sont présentes à l’abbaye et y assurent la prière (offices, messes) ainsi que l’accueil monastique. Elles vivent dans l’abbaye, propriété de l’État gérée par le Centre National des Monuments Nationaux.
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Aujourd’hui, une communauté de six sœurs et une communauté de cinq frères vivent la mission que l’Église leur a confiée, s’insérant dans leur charisme propre – d’être « au cœur du monde » pour être « au cœur de Dieu ».
Une vie qui s’articule autour de trois piliers : la prière, le travail, la vie fraternelle. Frères et sœurs de Jérusalem célèbrent ensemble la liturgie et travaillent conjointement à d’autres activités pastorales. Ils forment toutefois deux Instituts de vie consacrée, autonomes.
Les moines et moniales sont des hommes et des femmes qui consacrent leur vie à Dieu et vivent en communauté dans les grands centres urbains. Ils veulent mettre la prière dans la ville et porter la ville dans leur prière. Révéler ainsi par leur vie contemplative et fraternelle la présence de Dieu au cœur du monde, selon leur spiritualité formulée dans le Livre de vie de Jérusalem.
Moines et moniales ne cohabitent pas, mais partagent des moments de prière, d’études, de rencontre et les offices religieux. Ce sont des salariés vivant de leur travail, considérant que le travail est le lot et la dignité de l’homme moderne. Ils choisissent cependant un travail à mi-temps, pour se garder de tout esprit d’accumulation de richesses et de réussite socio-professionnelle.
18h30 la messe, les chants sont superbes, ils nous touchent au plus profond de notre sensibilité.
Leur liturgie ouverte à tous, en partie inspirée de l’Orient chrétien, est chantée trois fois par jour en polyphonie.
19h10 le repas pris en silence, et 20h complies sous le réfectoire.
Colette mange avec les Sœurs, célèbre les complies avec elles.
De mon côté le repas est pris avec les Frères. Dehors, libéré du silence, je me rapproche de Frédéric, un belge de Mons, un montois comme ici, dit-il. Nous ne croyons pas au hasard. Notre démarche spirituelle est semblable : celle inspirée des bâtisseurs de cathédrales.
En ce qui me concerne se rajoute celle de mon inspirateur psycho-spirituel Carl Gustave JUNG, et mon expérience chamanique en forêt amazonienne – Rencontre avec l’Esprit des Plantes
Avec mes propres icônes, et grâce à ma foi religieuse naturelle, que j’entretiens jour après jour dans mes méditations/prières, je me sens très proche de la liturgie des Frères et des Sœurs.
Mercredi 29 janvier 2020
Nous participons aux trois offices de la journée (laudes, messe, vêpres) et partageons la table des sœurs (Colette) ou des frères (Hélios).
Lever à 5h50, pour assister aux Laudes. Chants dès 6h30. Mais il faut monter les 259 marches. Colette les a recomptés ce jour. Il est vrai que depuis notre arrivée, nous n’arrêtons pas de monter et de descendre les escaliers du Mont.
Car la messe est à 12h, puis les Vêpres à 18h30.
A cela, nous remontons pour les repas, pour les redescendre, regagner notre hébergement. Puis l’envie de grimper et de redescendre pour le plaisir de visiter, de fureter, passer d’un petit jardin à un autre. Ouvrir les portes, bien les refermer, faire attention à leurs prises au vent. Et là nous réalisons que nous sommes infatigables : mais d’où nous vient cette énergie ?
En ce mercredi matin, après le petit-déjeuner pris séparément, nous nous retrouvons en haut, sur le parvis de l’abbatiale pour connaître les heures de visite guidée.
La porte est ouverte, personne… nous avançons, nous cherchons…toujours et encore personne, pour finalement nous retrouver seuls visitant les lieux.
Cette porte aurait dû être fermée !!!
Étions-nous guidés ? Tout nous le laisse croire.
Aussi dans le calme, nous prenons tout notre temps pour faire les photos à notre rythme, suivant le sens de la visite.
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In fine, nous nous retrouvons dans la boutique d’achats de souvenirs.
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Et à notre surprise personne ne s’étonne de notre arrivée !!!
Là aussi nous prenons tout notre temps, et achetons 2 livres : Colette les chemins de St Jacques, « à moi », Frédéric Lenoir, « Petit traité de l’histoire des religions ». Nous pensions en toute bonne foi qu’avec le badge « retraitants », ce parcours de visite nous était accessible. Or pas du tout, il fallait prendre un ticket payant, en bas. Ce que nous avons fait le lendemain avec un audio guide.
A midi l’eucharistie est célébrée. Comme « par hasard », je lis, juste avant sur la fiche permettant de suivre la messe, que les non catholiques, et les non baptisés (c’est mon cas) pouvaient recevoir la bénédiction, en se présentant les bras croisés. Cela me met en conformité totale avec le rituel.
Car, depuis Noël en 2016, pour ma 1ère retraite, en profane je m’étais glissé dans le groupe des Frères Bénédictins célébrant l’eucharistie, à Ste Marie du Désert (Banlieue toulousaine) . J’avais gardé un arrière-goût de « désacralisation », une forme de non-respect. Là, je me reconnais différent et libre dans ma spiritualité partagée. Je ressens la paix de l’âme, une joie intérieure sereine, respectueux envers les Frères, les Sœurs et avec moi-même.
A 13h15, j’ai mangé avec les frères, nous sommes accompagnés par la lecture du livre : « La nuit où Notre Dame brûle », écrit par le capitaine des pompiers.
Le repas nous est servi à table par un frère. Le livre circule, 4 frères se relaient.
Jeudi 30 janvier 2020
Quel bonheur cette retraite. Que d’énergies emmagasinées. Les journées remplies de plénitude.
L’enthousiasme de Colette communicatif : mardi soir elle parle déjà de son envie de revenir.
Le rythme est royalement pris. Lever le matin à 5h50, pour assister aux Laudes. Chants dès 6h30, monter les 259 marches, par tous les temps, pluie, vent, lever du jour au loin …
Voir la nuit tomber sur le mont, parcourir les remparts tard le soir, respirer l’air du large bien emmitouflés dans nos parkas, des instants hors du temps avec des éclairages nocturnes particulièrement enveloppants.
Quelques repas pris également à l’hôtel d’Abraham entre retraitants. Comme sur les chemins de St Jacques, le soir dans les gites où les échanges sont de plus en plus sincères, de plus en plus fraternels, à cœurs ouverts, où chacun livre des pans de son histoire, de son parcours jalonné d’épreuves existentielles.
Ressentir la foi, la partager, communier avec des sensibilités religieuses ou non, expliquer comment « mes icônes » me connectent au concept de Dieu, le Tout, Dame Nature, l’Univers, la Terre et les Cieux.
Vendredi 31 janvier 2020
Fin de la retraite – Sur et Dans – le Mont St Michel. Et comme je l’évoquais hier pendant le repas du soir à l’Hôtel d’Abraham, je me sens libéré. En mettant mon rétroviseur aux commandes de ma psyché, sur mon passé invité au présent, je sens que ma spiritualité est libre, et d’un niveau équivalent aux moines ou moniales. Cela peut paraître présomptueux et pourtant.
Cette agréable sensation, je l’ai sentie dans nos échanges particulièrement chaleureux auprès de Sœur Claire avant notre départ. Animés par une foi spirituelle « vibratoire », elle dans le dogme et moi dans le « non baptisé », nous accueillions la transcendance d’un Esprit supérieur à nous.
En forêt amazonienne, lui ai-je dit grâce à l’Esprit des plantes, j’ai reçu la visite d’un Archange : un ARCHÉTYPE plein d’amour. (L’Archange Vision ésotérique) J’ai rajouté :
« La manifestation de cette force est en tout et en toute chose. Pour moi tout est vivant : même les objets « pétris de matière » sont ultra-vivants, à chacun d’apprendre à approcher cette perception, dont la clé est la foi religieuse naturelle».
Heureux, de me sentir quelque part également « reconnu » dans mes démarches spirituelles, par Véronique et Marie Laure, profondément catholiques, dont l’une me proposait avec sincérité, le baptême…Des militantes engagées dans leur domaine, avec une foi à soulever des montagnes. Libéré par mon parler vrai, sans arrières pensées : heureux de partager la foi religieuse naturelle, qui est en chacun de nous.
Satisfait d’avoir pu glisser à Frédéric, hier soir sur les remparts, la limite des constructeurs de cathédrales (les spéculatifs en rapport avec les vrais bâtisseurs opératifs). La veille, il m’avait invité à parcourir sur sa tablette, un livre écrit par un spéculatif sur le Mont St Michel. Un texte initiatique sur la construction du site, avec différents degrés symboliques, hautement « scientifiques », mathématisés, décrivant de façon détaillée ses pôles d’énergies à des endroits précis, repérés, géo localisés, décrivant ce lieu mystérieux.
J’ai ressenti la déshumanisation de cet écrit, qui pour moi, limite le Mont et « le rabaisse » à la vision d’un esprit purement mental, rationnel, intellectuel. Le Mont construit sur la matière, régi par « l’esprit des lois » de la géométrie, animé certes par le nombre d’or, mais dans une démarche purement exotérique.
Non, le Mont St Michel est tout autre. Sous la houlette de son Archange Michael terrassant l’ego (que chacun investit à sa mesure, ou pas), le Mont invite à rencontrer le divin en nous, l’Esprit….sentir sa présence… pour aller puiser cette énergie au plus profond de l’essence de notre existence…. Nous aider à donner un sens à la vie, connecté à des forces venant d’ailleurs, dont la réalité ésotérique est inaccessible à l’esprit humain, enfermé dans le mental.
Le Mont St Michel accueille toutes les sensibilités religieuses ésotériques, quelles qu’en soient leurs sources : dogmatiques ou non. Il nous reçoit, nous crée et nous conçoit, à travers nos propres icônes.
Dans l’ouverture, l’acceptation et la différence de nos parcours religieux/spirituels, les Frères et les Sœurs de Jérusalem sont des intercesseurs, entre l’Esprit du Mont et nous.
A condition que nous nous laissions porter par leurs chants liturgiques, leur mode de vie fraternel, leur prière et leur travail, au cœur de la ville.
Merci à eux, et à tous ces bénévoles, qui contribuent par leur présence active, à une belle rencontre avec soi-même.
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